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28 Juin 2021

Une Déclaration conjointe à l'occasion de la Journée internationale de soutien aux victimes de la torture

  • Appel pour qu'une attention internationale continue soit portée au problème de la torture en Chine
  • Inviter la Chine à remplir ses obligations en tant qu’État partie à la CCT, notamment en adoptant des mesures efficaces pour interdire toute forme de torture.

La Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (CCT) est entrée en vigueur le 26 juin 1987. Cette journée a été désignée Journée internationale des Nations Unies pour le soutien aux victimes de torture en 1997.

Cette année marque le 34e anniversaire de la CCT. À cette occasion, nous, soussignés, publions cette déclaration pour appeler la communauté internationale à rester unie et résolue dans le suivi de la question de la torture en Chine. C’est essentiel pour encourager le gouvernement chinois à faire face aux violations des droits de la personne dans le pays et à prendre des mesures pour y remédier.

La Chine fait partie des premiers pays à avoir ratifié la CCT. Cependant, elle n’a jamais fait preuve de détermination pour abolir la torture, un fait inquiétant soulevé par les experts de l’ONU sur les questions de torture et de traitements inhumains lors de leurs dialogues avec le gouvernement chinois. Par exemple, les experts ont souligné à maintes reprises qu’en tant que signataire de la CCT, la Chine est tenue de définir la torture conformément aux normes et principes internationaux en matière de droits humains, de modifier son code pénal et ses procédures, de réglementer ses pouvoirs exécutifs et d’application de la loi, élaborer des statistiques et des bases de données, ainsi que de fonder un mécanisme efficace pour le contrôle et la responsabilité.

Cependant, nous regrettons de voir que la plupart, sinon la totalité, de ces recommandations ont été ignorées et que la majorité des victimes de torture en Chine n’ont aucun recours.

Le gouvernement chinois manœuvre plutôt pour renforcer son code pénal draconien, étendre son pouvoir exécutif au nom des termes vagues et larges définissant la sécurité de l’État, et pour rationaliser et légaliser les mesures, y compris la « surveillance résidentielle dans un endroit désigné » et d’autres formes de détentions arbitraires et prolongées, permettant ainsi de pérenniser la torture. Les victimes de torture sont réduites au silence et le système judiciaire dans son ensemble est encore plus déformé.

Selon des informations données par des victimes de torture, pendant leur détention, elles sont soumises à la torture et à des traitements inhumains tels que des agressions physiques, des coups, des chocs électriques, des postures fixes prolongées, l’isolement, la privation de sommeil et de nourriture, la violence verbale, les menaces et l'intimidation.

À cet égard, nous sommes profondément préoccupés par les récents rapports selon lesquels l’avocat basé à Pékin Ding Jiaxi (丁 家 喜), le juriste Xu Zhiyong (許 志 永) et le défenseur des droits humains du Guangdong Niu Tengyu (牛 滕 宇) ont été torturés pendant leur détention.

De plus, nous sommes toujours préoccupés par le bien-être physique et psychologique de :

  • L'avocat Chang Weiping (常瑋平), de la ville de Shaanxi, qui est détenu au secret depuis octobre 2020 après avoir révélé les tortures qu'il a subies plus tôt dans l’année ;
  • Les 3 de Changsha (長沙公益仨) – Cheng Yuan (程淵), Liu Yongze (劉永澤) et Wu Gejianxioang (吳葛健雄) – détenus au secret depuis juillet 2019 ;
  • La jeune féministe et chercheuse Li Qiaochu (李翹楚), arrêtée officiellement en mai à Pékin et,
  • l'avocat en droits humains Yu Wensheng (余文生), qui purge désormais 4 ans de prison à Nanjing.

À l’exception de Niu Tengyu, toutes les personnes susmentionnées sont accusées de crimes liés à la sécurité de l’État, ce qui limite légalement leur accès aux services d’un avocat et accentue leur vulnérabilité et le risque d'être torturé.

Nous tenons à souligner qu’en plus de cibler des dissidents et des défenseur-ses des droits humains, de récents rapports ont également révélé que la torture est systématiquement utilisée pour soumettre les minorités ethniques au Xinjiang et comme outil de gouvernance et de répression dans d’autres régions où il y a des minorités ethniques.

Compte tenu de ces graves préoccupations, nous demandons au gouvernement chinois d’accepter de coopérer pleinement avec les experts des Nations Unies. Cela signifie, qu'il devrait en priorité permettre aux experts internationaux des droits humains, y compris au Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’Homme, d'accéder convenablement et sans entrave aux Ouïghours, aux Kazakhs, aux Hui, aux Kirghizes et aux autres communautés affectées du Xinjiang, sans plus attendre, tout en respectant ses conditions préalables.

Nous réitérons nos demandes au gouvernement chinois de respecter ses obligations en tant qu’État partie de la CCT et de s’efforcer avec diligence d’éliminer la torture et les traitements inhumains dans le pays en répondant de façon proactive et sérieuse aux préoccupations des experts de l’ONU.

Nous réaffirmons les principes et normes internationaux en matière de droits humains et appelons la Chine à réformer ses procédures pénales et ses mécanismes en conséquence :

Libérer immédiatement tous-tes les avocat-es, défenseur-ses des droits humains et tous-tes les citoyen-nes dont les détentions ne sont pas conformes à l’application régulière de la loi pénale prescrite dans les normes internationales relatives aux droits humains ;

Reconnaître le caractère non dérogatoire du droit contre la torture et qu’il ne peut faire l’objet d’aucune exception en vertu du droit interne ;

Incorporer dans le droit national la définition de la torture conformément à la CCT et, par conséquent, modifier la Loi sur la procédure pénale, notamment en supprimant la détention arbitraire et prolongée et en garantissant le droit d’accéder à un avocat de son choix, etc ;

Établir un mécanisme de plainte accessible, transparent et efficace pour assurer la réparation et un recours pour les victimes de torture, et veiller à ce que les auteurs de torture soient tenus légalement responsables ;

Établir un comité indépendant d’experts gouvernementaux et non gouvernementaux pour superviser la mise en œuvre effective de la CCT en Chine.

Nous, les organisations soussignées, nous engageons à continuer de nous exprimer sur la situation des droits humains en Chine et, dans le cadre d’efforts conjoints, nous ferons pression pour l’élimination de la torture dans ce pays et dans le monde entier.

Organisations cosignataires :

 

  • Amnesty International Taiwan (AI), TW
  • Avocats Sans Frontieres (ASF)
  • China Change, USA
  • China Against the Death Penalty (CADP), USA
  • China Political Prisoners Concern Group, HK
  • Chinese Human Rights Defenders (CHRD), USA
  • Christian Solidarity Worldwide (CSW), UK
  • Committee to Support Chinese Lawyers, New York, USA
  • Economic Democracy Union, Taiwan
  • Foundation Day of the Endangered Lawyer, Pays-Bas
  • Front Line Defenders (FLD), Irlande
  • Hong Kong Outlanders Executive Committee, Taiwan
  • Human Rights Now (HRN), Japon
  • Human Rights Watch (HRW), USA
  • International Service on Human Rights (ISHR), Suisse
  • International Tibet Network, USA
  • Judicial Reform Foundation (JRF), Taiwan
  • Lawyers for Lawyers (L4L), Pays-Bas
  • Lawyers' Rights Watch, Canada
  • Leitner Center for International Law and Justice, New York, USA
  • Comité de surveillance des attaques contre les avocats, France
  • International Association of People's Lawyers (IAPL)
  • New School for Democracy, Taiwan
  • Taipei Bar Association, Taiwan
  • Taiwan Alliance to End the Death Penalty, Taiwan
  • Taiwan Association for Human Rights, Taiwan
  • Taiwan Bar Association, Taiwan
  • Taiwan Support China Human Rights Lawyers Network, Taiwan

Individuals

  • Jean-Philippe BEJA,Chercheur professeur émérite CNRS-CERI Sciences po, France
  • Jerome A. COHEN, Professor of Law Emeritus, New York University,USA
  • Martin FLAHERTY, Visiting Professor, School of Public and International Affairs, Princeton University, USA
  • Eva PILS, Professor, Dickson Poon School of Law, King’s College London, Royaume Uni
  • Stuart RUSSELL, Macquarie University School of Law, Australiae (retired)
  • TENG Biao, Pozen Visiting Professor, University of Chicago, USA