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Module 24: CRÉER UN PLAN DE PROTECTION ORGANISATIONNELLE

Module 24: CRÉER UN PLAN DE PROTECTION ORGANISATIONNELLE

Objectifs 

Créer ou améliorer un plan de protection organisationnelle pour chaque organisation

Durée totale

75 minutes

Répartition du temps

Introduction - 10 min
Processus d’élaboration d’un plan - 30 minutes
« Oui, mais… » - 15 minutes
Intégrer la protection
Préparation des organisations - 15 minutes
Conclusion - 5 minutes

Matériel nécessaire

Tableau à feuilles, marqueurs

Lors de la préparation et de l’animation de cette session, il est important d’appliquer systématiquement une perspective intersectionnelle à l’identité et aux expériences de chaque participant, ainsi qu’à ses besoins en matière de protection. Les systèmes de discrimination et de privilège qui se chevauchent, comme le genre, l’orientation sexuelle, la religion, le handicap, l’origine raciale ou ethnique, la situation économique ou la classe sociale, l’état matrimonial, la citoyenneté, l’âge et l’apparence physique peuvent avoir un impact profond sur la perception et l’expérience des risques et la protection des défenseurs des droits humains et de leurs communautés.

Remarque pour le facilitateur : cette session est conçue pour des DDH venant de différentes organisations. Si votre atelier est organisé pour les DDH d’une même organisation, utilisez un format sans exemples sur lesquels travailler, et augmentez le temps de manière significative.

Introduction: 10 mins

  • La plupart des organisations ont déjà un plan de protection de base (p. ex., verrouiller les portes du bureau, téléphoner à une personne pertinente en cas de problème).
  • (sauf si tous les participants proviennent d’une seule organisation) nous ne produirons pas de plan de sécurité standard durant cette session, car chaque organisation est différente et a besoin d’un plan pour son contexte propre
    Conseil

    Créer un Plan de protection organisationnelle avec tous vos collègues concernés afin qu’il réponde à leurs besoins et qu’ils veuillent le mettre en œuvre

     

  • Lorsque vous retournerez dans vos organisations, votre tâche sera d’aider vos collègues à créer une version plus complète et plus pertinente tous ensemble, en fonction des risques et des menaces auxquels vous êtes confrontés
  • Tous les travailleurs pertinents et dignes de confiance doivent participer à l’élaboration du plan, sinon ils seront réticents à le mettre en œuvre et à l’améliorer au fil du temps.

« Si vous n’impliquez pas l’agent d’entretien de votre bureau, il se peut qu’il ne connaisse pas l’importance de ne pas encombrer l’issue de secours avec des ordures. Si vous n’impliquez pas le chauffeur de votre organisation, il se peut qu’il ne se rende pas compte qu’il faut vous aviser si un véhicule vous suit. »

 

  • Un « expert » externe ne sera pas en mesure de créer un plan pour vous, car il n’a pas vos connaissances de ce qu’il se passe au niveau local ni la compréhension de la façon dont vous faites votre travail.
  • Il n’est pas difficile de créer un plan de protection organisationnelle — les outils que nous avons déjà utilisés seront utiles, et le travail que vous accomplissez pour créer votre plan de protection personnelle sera très pertinent.
  • Nous utiliserons un autre outil, l’analyse FFOM (analyse des forces, des faiblesses, des opportunités et des menaces)
  • Vérifiez quels participants ont déjà des plans de protection organisationnelle et demandez des exemples des bonnes et mauvaises pratiques qui y sont associées, p. ex., « un expert est venu et a rédigé un plan de protection pour nous et il se trouve dans un tiroir et n’est pas mis en œuvre »

Plan de sécurité — le processus: 30 minutes

Faire un plan de sécurité pour votre organisation — proposez ce qui suit :

  1. Discutez : quelle est l’importance de la sécurité et pourquoi ? (Vous pouvez utiliser le Module « Comprendre la sécurité » pour lancer cette discussion.)
  2. Examinez le contexte dans lequel vous recevez les menaces dans votre organisation — vous pouvez utiliser une analyse FFOM (forces et faiblesses internes, opportunités et menaces externes). Faites un brainstorming, écrivez les contributions de chacun et priorisez questions les plus importantes.

Exemple:
 

Les forces de votre organisation en termes de sécurité

Les faiblesses de votre organisation en termes de sécurité

  • un personnel engagé
  • un personnel supérieur ayant de l’expérience en matière de gestion des menaces
  • un réseau existant de contacts influents, y compris dans le gouvernement, les médias, les ONG locales et internationales
  • les connaissances en termes de gestion de menaces ne sont pas partagées de manière uniforme
  • aucun registre des incidents de sécurité
  • aucun plan de protection

Opportunités externes de protection

Menaces externes à la protection

  • Possibilité d’étendre notre réseau afin d’y inclure d’autres personnes : plaidoyer ; questions juridiques ; protection numérique et soutien psychosocial
  • Orientations de l’Union européenne sur les DDH — possibilité de s’adresser aux ambassades pour obtenir du soutien
  • Potentielle législation pour contrôler et financer les activités des ONG
  • L’armée et les groupes d’opposition armés menacent les ONG œuvrant dans le domaine des droits humains.

 3. Mettez-vous d’accord sur les trois risques et menaces les plus importants, en vous basant sur la probabilité qu’ils se produisent, et le plus lourd impact. Vous pouvez travailler davantage sur les autres risques prioritaires à l’avenir, mais il est préférable de commencer par quelque chose de gérable et qui n’est pas écrasant.

 4. Vous pouvez utiliser la matrice des risques1 et, pour chacun des risques et des menaces, inviter chaque employé à identifier les niveaux de probabilité et d’impact.

MODULE X : Analyser les risques — la matrice du risque pour un plan de protection organisationnelle [LINK]

LA MATRICE DU RISQUE

Probabilité que le risque ou la menace se produise.

Impact : dommage ou blessure qui résultera si le risque ou la menace se produit.

L’évaluation des probabilités consiste à examiner l’historique de la répression et des actions menées contre les DDH et les organisations/réseaux/communautés similaires aux vôtres, le contexte historique et actuel ainsi que les capacités et les intentions des auteurs.

L’évaluation de l’impact tient compte des préjudices physiques et psychologiques infligés aux membres, aux collègues et à leurs familles, ainsi que des pertes et des dégâts physiques infligés aux bâtiments, aux informations et autres biens, mais aussi les dommages causés à la réputation.

Exemple

Une FDDH travaillant dans l’État de Shan au Myanmar, où il y a un conflit, a expliqué que ses risques étaient différents et plus élevés que ceux de son directeur birman basé dans un bureau de la capitale. Premièrement, en tant que femme shan, elle peut être davantage harcelée par les autorités. Deuxièmement, voyager — en canot, en moto et à pieds — peut prendre plusieurs jours et transporter de l’argent pour organiser des ateliers dans des villages éloignés, représente un risque supplémentaire. Des plans de sécurité spécifiques impliquant une couverture, des bénéficiaires de confiance pour organiser le transport, la nécessité d’être en lieu sûr chaque nuit, et le fait de conserver les fonds dans différentes cachettes étaient essentiels.

Cette discussion vous aidera à voir comment, selon l’intersectionnalité et les situations, le risque touche tout le monde différemment. Grâce à la discussion, vous parviendrez à comprendre des situations et des perspectives de manière plus approfondie. Accordez-vous mutuellement sur où placer le risque/la menace sur la matrice de l’organisation, tout en reconnaissant que les plans de protection individuels devront refléter les risques plus ou moins élevés auxquels ils sont confrontés par rapport aux risques/menaces, et aux autres collègues.

  5. Un par un, examinez les 3 plus grands risques et menaces. Réfléchissez à la façon de réduire la probabilité en créant une liste de Procédure opérationnelle permanente (POP) — ce qui devrait être fait ou ce qui ne devrait pas être fait (voir l’exemple de plan de protection ci-dessous).

  6. Ensuite, examinez comment vous pouvez réduire l’impact, en créant un plan d’urgence, au cas où le risque se produirait. Certains des éléments devront également être inclus dans les PON ou dans d’autres plans organisationnels, par exemple si le risque/la menace est une attaque physique, l’organisation peut payer ou contribuer aux soins de santé pour le personnel, un fond peut être créé, ou une assurance maladie peut être souscrite à l’avance.

  7. Les PON et le plan d’urgence rassemblés forment votre plan de protection. Ces renseignements doivent être communiqués aux nouvelles recrues, et doivent être d’abord revus après trois mois pour vérifier s’ils sont appliqués, puis revus tous les six mois ou lorsque le contexte change.

PLAN DE PROTECTION —date et numéro de la version

  • Nom de l’organisation :
  • Objectif(s) de l’organisation :
  • Postes clés et coordonnées : Point focal en charge de la sécurité, avocat, médecin, etc.
  • Objectif du plan de protection : par exemple, veiller à ce que tous nos travailleurs soient conscients des risques et des menaces et qu’ils connaissent les mesures qui doivent être prises pour se protéger, protéger les collègues, nos bénéficiaires et notre travail
  • Contexte des menaces et des risques :
  • Exemples de menaces et d’attaques physiques et numériques déjà subies par l’organisation, le cas échéant :
  • Des plans spécifiques pour des risques spécifiques, par exemple :
     
EXEMPLE

PROBABILITÉ

MESURES POUR ATTÉNUER LA PROBABILITÉ

IMPACT

MESURES/PON POUR ATTÉNUER L’IMPACT

Arrestation

Moyen pour les directeurs

Faible pour les autres

  • organiser une consultation avec un avocat pour parler des droits et des mesures d’atténuation des risques
  • réduire l’activité publique en périodes sensibles

très élevé ou élevé pour les femmes et généralement moyen pour les autres

  • apprendre par cœur le numéro de l’avocat
  • appeler l’avocat immédiatement
  • connaître vos droits
Burnout

(surmenage)

Élevée pour l’équipe d’intervention d’urgence et le personnel du refuge, moyenne pour les autres

  • revoir les heures et les jours de travail et le personnel est activement encouragé à arrêter les heures supplémentaires et à prendre un congé
  • réunions régulières avec la direction pour parler du travail et de l’impact
  • sessions de bien-être pour parler des outils pour faire face à la situation

moyen à élevé, selon l’identité, la situation et les capacités

  • possibilité de prendre un congé
  • proposer l’aide d’un thérapeute ou des séances de soutien
  • soutenir le personnel selon les demandes et les besoins

 

Piratage

Moyen

  • installer des logiciels et des applications plus sûres
  • organiser une formation sur la protection numérique pour tout le personnel

élevée pour l’organisation si des données sensibles sont révélées

  • créer une politique de gestion et de stockage de l’information, p. ex., l’information verte est publique ; l’information orange est interne et l’information rouge est privée ; placer tous les types d’informations dans ces catégories
  • former le personnel à toute nouvelle politique

  8. Au cours de la discussion, ajoutez un plan d’action à votre plan de protection — une liste d’actions et des capacités nécessaires — en répartissant les responsabilités, le budget et les actions selon ce qu’il convient.

PLAN D’ACTION DE PROTECTION - date

EXEMPLE

PERSONNE EN CHARGE

BUDGET ALLOUÉ

DATE LIMITE

Session avec un avocat

Directeur

Bénévole

Fin de semaine prochaine

Formation sur la protection numérique 

Directeur des ressources humaines

Demander aux donateurs pour le budget de l’année prochaine

4 mois

Digital protection training

Responsable informatique

Vérifiez si nous avons des contacts qui peuvent le faire gratuitement, ou le coût d’autres options, ou consacrez du temps dans notre organisation pour étudier chapitre par chapitre les conseils de Security-in-a-Box

3 mois

Il est utile de faire une annexe à votre plan, énumérant les incidents de sécurité que vous avez vécus et les mesures prises. Assurez-vous de tenir compte de la confidentialité des personnes concernées, et aussi de savoir qui peut accéder à cette section ou non.

Enfin, votre plan de protection nécessite un formulaire de signalement d’incident de sécurité

Ressource 9 et Ressource 11 proposent un autre exemple de format de plan de protection organisationnelle.

« Oui, mais… » 15 mins

« Maintenant que nous avons pratiquement terminé l’atelier, il est temps de partager vos préoccupations. Par exemple, certains d’entre vous peuvent penser “oui, mais cela ne va pas fonctionner dans mon organisation car…“ Partageons ces inquiétudes. »

Remarque pour le formateur :

S’il n’y a qu’un ou deux points (par exemple, ‘notre directeur est courageux, il a une tolérance élevée au risque et il n’aime pas suivre les procédures de protection’), on peut en discuter avec tout le groupe. Si plusieurs problèmes sont identifiés, le formateur peut diviser les participants en différents groupes de sorte que plus de problèmes soient abordés, en faisant un rapport à tous à la fin.

Intégrer la planification de la protection dans les organisations : 15 mins

La création du plan de protection n’est que le début de la planification de la protection. Dans certaines organisations, le plus grand défi consiste à veiller à ce qu’il soit bien mis en œuvre.

Demandez aux participants ce qui aiderait à assurer la mise en œuvre du plan et discutez des réponses. De même, parlez de ce qui conduirait à ce qu’il soit ignoré peut être instructif.

  • commencer par une conversation générale avec tous les employés et les bénévoles
  • lancer le sujet de la protection afin qu’il fasse partie de la planification du travail de chacun et de chaque discussion pertinente
  • parler de la protection comme d’un voyage qui se façonne petit à petit
  • rappeler que nous faisons tous des erreurs et rassurer les gens pour qu’ils puissent partager ce qu’ils ont fait sans récriminations. Car le contraire, être secret au sujet des risques pris, peut accentuer le danger pour tout le monde.
  • parler individuellement avec certaines personnes clés qui peuvent partager diverses expériences lors des réunions du personnel (et ne pas se contenter de dire qu’il faut planifier la protection)
  • décider qui doit participer à l’élaboration du plan de protection (idéalement tout le personnel, au début, mais si la confiance est un problème, vous devrez envisager d’exclure ceux qui ne travaillent pas à des postes clés ou dont la loyauté peut être mise en doute)
  • envisager un jeu de rôle, p. ex., une descente de police dans les bureaux (veiller à ce que personne ne soit traumatisé en tenant compte des besoins et des expériences personnelles et en prévenant tout le monde)
  • jouer à un jeu, le personnel et les bénévoles étant divisés en groupes. Chaque groupe invente un scénario probable (par exemple, un informateur essaie de vous rejoindre ; le téléphone de quelqu’un est piraté ; votre bureau est attaqué par des voyous locaux). Mettez tous les scénarios dans un chapeau et demandez à chaque groupe d’en choisir un et d’élaborer un plan de protection assorti de mesures d’atténuation. Écoutez les commentaires et utilisez-les comme base de votre plan.
  • nommer un petit groupe (reflétant la diversité de votre organisation) pour superviser les questions de protection, avec une seule personne comme point focal
  • avoir un plan écrit pour pouvoir le remettre aux nouveaux employés ou aux nouveaux membres
  • le mettre à jour tous les 6 mois ou lorsque le contexte change, et s’y référer ou le modifier régulièrement, cela doit être un document vivant

Ressources:

Manuel de sécurité : Mesures pratiques pour les défenseurs des droits humains en danger, chapitre 5

Conclusion :

Nous sommes désormais arrivés à la fin de l’atelier. Nous espérons que tout le monde est désormais assez confiant pour élaborer des plans de protection et qu’il a tiré des enseignements précieux du processus et de l’expérience de chacun.

Rappel de certains points clés :

  1. les meilleurs plans de protection sont créés par les personnes touchées par les menaces
  2. le processus d’analyse des risques doit être holistique et identifier les risques et les menaces physiques, numériques et psychosociaux ainsi que les mesures d’atténuation.
  3. il doit y avoir une personne chargée de superviser la mise en œuvre des plans
  4. les plans doivent être examinés périodiquement a) pour vérifier leur efficacité et b) lorsque les circonstances changent
  5. la planification de la protection est essentielle pour que les défenseurs continuent à travailler en toute sécurité et continuent d’aider leurs communautés à revendiquer leurs droits.

Nous ferons un suivi avec vous dans six semaines pour vous proposer de l’aide et obtenir vos précieux commentaires et retours afin de mieux préparer nos futurs ateliers avec les DDH.

Pour finir :

Pour certaines options, voir Ouvertures, pauses stimulantes et clôtures

 

 

 

1 Remarque pour le formateur : Lire la description plus complète de la matrice du risque ici : Module 12: ANALYSER LES RISQUES — LA MATRICE DU RISQUE POUR UN PLAN DE PROTECTION ORGANISATIONNELLE