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27 Février 2023

Le CPJ et les groupes de défense des droits appellent le Bangladesh à cesser de harceler Rozina Islam dans une lettre publique

 

M. Asaduzzaman Khan, Député et ministre de l’Intérieur de la République du Bangladesh minister@mha.gov.bd

M. Zahid Maleque, Député et ministre de la santé et de l’aide sociale de la République du Bangladesh minister@mohfw.gov.bd

Messieurs les Ministres Khan et Maleque,

Nous soussignés, les groupes de défense de la liberté de la presse et des droits humains, vous écrivons pour solliciter votre position de premier plan afin d’assurer la fin immédiate du harcèlement de la journaliste et défenseuse des droits humains bangladaise Rozina Islam. Rozina Islam fait face à une enquête en vertu de la loi sur les secrets officiels, datant de la période coloniale, et du Code pénal, pour avoir simplement exercé son droit à la liberté d’expression en signalant des allégations de corruption et d’irrégularités dans le secteur de la santé publique au début de la pandémie de COVID-19. Si elle est officiellement accusée et inculpée en vertu de la loi sur les secrets officiels, Rozina Islam risque jusqu’à 14 ans de prison ou la peine de mort. Mme Islam a été arbitrairement détenue pendant sept jours en mai 2020, lorsqu’un fonctionnaire du ministère de la Santé a déposé une plainte accusant la journaliste de prendre des photos de documents officiels au secrétariat du ministère, ce qui a mené à l’enquête actuelle.

Depuis sa libération sous caution, Rozina Islam est régulièrement citée à comparaître devant les tribunaux, dont beaucoup ont été indûment retardées et reportées en violation de son droit à un procès équitable garanti par l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel le Bangladesh est partie. En août 2021, la Cellule du renseignement financier du Bangladesh a demandé aux banques de fournir les détails des transactions de tous les comptes détenus par Rozina Islam, dans le but apparent d’intimider la journaliste.

Rozina Islam continue de faire face à des restrictions illégales de son droit à la liberté de mouvement, ce qui porte atteinte à l’article 12 du PIDCP. Elle a bénéficié d’une libération sous caution à la condition de rendre son passeport, ce qui équivaut de fait à une interdiction de voyager bien que le Code de procédure pénale ne prévoit pas de condition à une mise en liberté sous caution. En janvier 2022, un tribunal de Dhaka a temporairement autorisé que son passeport lui soit restitué pendant six mois. Pourtant, depuis, Rozina Islam est obligée de demander son passeport à la cour lorsqu’elle prévoit de voyager à l’étranger.

Après 14 mois d’enquête, la police de Dhaka a soumis son rapport final au tribunal en juillet 2022, et a demandé que l’affaire contre Mme Islam soit abandonnée faute de preuves. Sept mois plus tard, en janvier 2023, le fonctionnaire du ministère de la Santé a déposé une pétition naraji (NDLT : pétition soumise par le plaignant lorsqu’il n’est pas satisfait des conclusions rendues par la police) contre le rapport de la section d’enquête, en réponse à laquelle le tribunal a ordonné au Bureau d’enquête de police d’enquêter davantage sur Mme Islam. Nous sommes profondément troublés par l’utilisation par un fonctionnaire d’une pétition naraji pour prolonger l’enquête sur une journaliste en vertu d’une loi relative à la sécurité nationale, étant donné que la police n’a pas produit de procès-verbal ni présenté de preuve concrète indiquant qu’elle a commis un crime.

Le travail de Rozina Islam, pour lequel elle a reçu le Anti-Corruption Champions Award 2022 décerné par le département d’État américain, est un service public pas un crime, et il devrait être protégé en vertu des sections 4 et 5 de la loi sur la divulgation des informations d’intérêt public.

Nous exhortons les autorités à pleinement respecter et protéger les droits de la journaliste et défenseuse des droits humains Rozina Islam, notamment son droit à bénéficier d’un procès équitable ; nous les appelons également à cesser immédiatement toute forme d’acharnement judiciaire contre elle, à faciliter la restitution de son passeport par les autorités judiciaires, et à garantir qu’elle ne soit plus la cible de représailles à cause de son travail.

Signé :

Amnesty International

Anti-Death Penalty Asia Network

Capital Punishment Justice Project

Coalition For Women In Journalism

Committee to Protect Journalists

CIVICUS: World Alliance for Citizen Participation (Alliance mondiale pour la participation citoyenne)

Dart Center for Journalism and Trauma

Free Media Movement

Front Line Defenders

La Fédération Internationale des Droits de l’Homme (FIDH), dans le cadre de l’Observatoire pour la protection des défenseur⸱ses des droits humains

International Federation of Journalists

International Women’s Media Foundation

Overseas Press Club of America

Pakistan Press Foundation

PEN America

PEN Bangladesh

Pen International

Reporters sans frontières (RSF)

Robert F. Kennedy Human Rights

South Asian Journalists Association

Organisation mondiale contre la torture (OMCT), dans le cadre de l’Observatoire pour la protection des défenseur⸱ses des droits humains

CC : Mr. Anisul HaqMinister of Law, Justice, and ParliamentPeople’s Republic of Bangladeshsecretary@lawjusticediv.gov.bd

CC : Mr. A.K. Abdul Momen, MPMinister of Foreign AffairsPeople’s Republic of Bangladeshfm@mofa.gov.bd