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12 Avril 2024

Chine : Libérez immédiatement l’avocat en droits humains Yu Wensheng et l’activiste Xu Yan

Le 13 avril marque le premier anniversaire de la détention de l’avocat Yu Wensheng et de son épouse, l’activiste Xu Yan.

Nous, les organisations de la société civile soussignées, sommes profondément préoccupées par cette affaire et demandons la libération immédiate et inconditionnelle de Yu Wensheng et de son épouse, l’activiste Xu Yan, car ils sont détenus uniquement pour avoir exercé pacifiquement leurs droits humains, notamment le droit à la liberté d’expression. Le couple, tous deux militants bien connus en Chine, a été placé en garde à vue alors qu’il se rendait à la délégation de l’Union européenne en Chine à Pékin le 13 avril 2023, où ils étaient invités à participer à une réunion avec l’ambassadeur de l’UE en Chine. Ils sont placés dans le centre de détention de Shijingshan à Pékin où ils sont restés jusqu’en janvier 2024, avant d’être transférés au centre de détention de Suzhou, dans la province de Jiangsu, à près de 1 000 km de là.

Yu et Xu ont été arrêtés pour avoir « provoqué des querelles et des troubles », une infraction excessivement large qui est utilisée comme arme pour cibler, intimider et harceler les défenseur·ses des droits humains, les activistes, les journalistes et les dissidents. En octobre 2023, Yu Wensheng et Xu Yan ont été inculpés de ces chefs d’accusation, ainsi que d’un autre chef d’accusation plus grave, celui d’« incitation à la subversion du pouvoir de l’État ». Les experts de l’ONU ont à plusieurs reprises exprimé leurs inquiétudes quant à l’utilisation par les autorités de ces deux types de crimes pour cibler les défenseur⸱ses des droits humains. Aucune date n’a été fixée pour leur procès.

Xu Yan aurait perdu 14 kg depuis son arrestation et les conditions de sa détention à Pékin peuvent s’apparenter à de la torture et à d’autres mauvais traitements. Elle est victime d’agressions verbales et intimidée par la police qui a menacé d’arrêter son fils s’il entreprenait de défendre son cas et celui de Yu. Leur fils, qui a eu 18 ans juste avant leur détention, a vu sa santé mentale se détériorer gravement au cours de l’année écoulée et souffre actuellement de dépression. Le transfert de Xu et Yu à Suzhou exacerbe son isolement et le risque de nouvelles atteintes à sa santé mentale.

À l’approche du premier anniversaire de leur arrestation, nous appelons le gouvernement chinois à respecter ses obligations internationales en matière de droits humains. Nous demandons instamment au gouvernement chinois de :

Libérer immédiatement et sans condition Yu Wensheng et son épouse Xu Yan, car ils sont détenus uniquement pour avoir exercé pacifiquement leurs droits humains, notamment le droit à la liberté d’expression ;

Dans l’attente de leur libération, veiller à ce qu’ils ne soient pas soumis à la torture ou à d’autres mauvais traitements pendant leur détention ;

Veiller à que leur fils puisse jouir de son droit à la santé, que ce droit soit pleinement protégé et que lui et les autres membres de leur famille ne soient pas soumis à des menaces, à des actes d’intimidation et de harcèlement.

Contexte

En 2020, Yu Wensheng, éminent avocat en droits humains, a été condamné à quatre ans d’emprisonnement et à la privation de ses droits politiques pour « incitation à la subversion du pouvoir de l’État », uniquement parce qu’il avait exercé pacifiquement son droit à la liberté d’expression. Depuis sa première arrestation en 2018, la santé de Yu s’est gravement détériorée en raison des mauvaises conditions de détention et de la torture et autres mauvais traitements présumés qu’il subit.

Pendant la première détention de Yu, sa femme Xu Yan a lutté sans relâche pour la libération de son mari et a tenté à plusieurs reprises, en vain, de lui rendre visite en prison. Xu était sous surveillance constante et a dû faire face à plusieurs reprises au harcèlement des autorités chinoises ; elle a été convoquée, détenue et parfois interdite de quitter son domicile.

Yu Wensheng est le lauréat du prix Martin Ennals 2021, un prix annuel pour les défenseur⸱ses des droits humains sélectionné par un jury composé de 10 des principales ONG de défense des droits humains dans le monde. Il a été libéré le 1er mars 2022.

Cependant, le 13 avril 2023, Yu et Xu ont été placés en garde à vue alors qu’ils se rendaient à la délégation de l’Union européenne en Chine, où ils devaient assister à une réunion avec l’ambassadeur de l’UE en Chine, Jorge Toledo Albiñana, et un autre haut fonctionnaire de l’UE. Le 21 mai, la police a informé leur famille que Yu et Xu avaient tous deux été officiellement arrêtés pour « avoir provoqué des querelles et des troubles », une infraction excessivement large qui est utilisée comme arme pour cibler, intimider et harceler les défenseur·ses des droits humains, les activistes, les journalistes et les dissidents. En octobre, Yu Wensheng et Xu Yan ont été inculpés de ces chefs d’accusation, ainsi que d’« incitation à la subversion du pouvoir de l’État ».

Les experts des Nations unies ont demandé à plusieurs reprises l’abrogation de l’article 105, paragraphe 2, du droit pénal chinois relatif au crime d’« incitation à la subversion du pouvoir de l’État » ; en 2020, ils ont affirmé que la disposition pénale consistant à « provoquer des querelles et des troubles » portait atteinte au droit à bénéficier d’une procédure régulière et le principe de légalité énoncé à l’article 11, paragraphe 2, de la Déclaration universelle des droits de l’homme.

Début décembre 2023, Amnesty International a appris que les conditions de détention présumées de Xu Yan à Pékin pouvaient s’apparenter à de la torture et à d’autres mauvais traitements. Elle a reçu moins d’édredons que les autres détenus et a donc eu très froid ; elle a été contrainte de rester assise pendant de longues périodes, ce qui lui a provoqué un gonflement de ses jambes et des douleurs lombaires ; elle a subi des brimades de la part d’autres détenus, y compris des coups, et elle a perdu 14 kilos en raison de la mauvaise qualité de la nourriture en prison. Depuis qu’elle est détenue, elle a été examinée une fois par un médecin, qui a confirmé qu’elle avait un problème au bas du dos, mais ne lui a pas donné d’autres détails. Fin novembre, Xu Yan a entamé une grève de la faim pour protester contre le traitement qui lui est réservé et le déni de ses droits légaux. Des policiers l’ont agressée verbalement et l’ont intimidée en menaçant d’arrêter son fils s’il tentait de défendre son cas et celui de Yu.

Leur fils a eu 18 ans avant leur détention et, depuis lors, il vit seul, sous la surveillance étroite de la sécurité publique. En novembre 2023, des groupes de la société civile ont signalé qu’il avait fait une overdose de médicaments et avait été transporté d’urgence à l’hôpital ; les groupes pensent que cela est dû à l’impact de la détention de ses parents et de l’environnement sécuritaire sur son bien-être et sa santé mentale. Sa situation a été aggravée par le transfèrement de ses parents à Suzhou, une ville située à environ 1 000 kilomètres, ce qui le prive de la possibilité de demander des visites et d’apporter et de recevoir un soutien moral.

Signé, par ordre alphabétique

Amnesty International

ARTICLE 19

Asian Lawyers Network (ALN)

China Against the Death Penalty

China Dissent Network (previsouly known as china deviants)

Chinese Human Rights Defenders

Council of Bars and Law Societies of Europe (CCBE)

Deutscher Anwaltverein

FIDH, la Fédération internationale des droits de l’homme, dans le cadre de l’Observatoire pour la protection des défenseur⸱ses des droits humains

Freedom House

Front Line Defenders

Georgetown Center for Asian Law

HKersUnited

Hong Kong Outlanders in Taiwan

Human Rights Now

Humanitarian China

Independent Chinese PEN Center

Index on Censorship

International Bar Association’s Human Rights Institute (IBAHRI)

International Service for Human Rights (ISHR)

Lawyers for Lawyers

Martin Ennals Foundation

Organisation mondiale contre la torture (OMCT), dans le cadre de l’Observatoire pour la protection des défenseur⸱ses des droits humains

PEN America

PEN International

Safeguard Defenders

The Rights Practice

Uyghur Human Rights Project