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27 Novembre 2017

Fédération de Russie: Signature de la loi sur les "médias agents de l'étranger"

Le 25 novembre 2017, le président de Fédération de Russie a signé la loi sur les "médias agents de l'étranger". La loi cible les organismes de presse qui reçoivent des financements étrangers, en imposant de nouveaux critères et en introduisant de nouvelles sanctions pour les médias qui ne les respecteraient pas. Cette loi est un nouvel instrument législatif répressif, qui s'ajoute à la loi précédente sur les "agents de l'étranger" et à la loi sur les "organisations indésirables".

La loi fédérale sur "l'introduction de changements des articles 10.4 et 15.3 de la loi fédérale sur l'information, les technologies de l'information et sur la protection de l'information et de l'article 6 de la loi de Fédération de Russie sur les médias" (appelée loi sur les médias agents de l'étranger) a été approuvée par le Conseil de la Fédération (Haute chambre du parlement russe) le 22 novembre 2017, et signée par le président le 25 novembre 2017. Elle entre en vigueur immédiatement.

La loi a été signée en représailles à la classification de la chaine de télévision pro-gouvernementale Russia Today en tant qu'"agent de l'étranger", aux États-Unis, en vertu du Foreign Agents Registration Act -FARA (loi sur l'inscription des agents de l'étranger). Cette loi a été adoptée en 1938 et s'applique aux organisations engagées dans des activités politiques et dans la promotion des États étrangers. Deux organismes de presse opérant en Russie, Voice of America et Radio Liberty, ont déjà été informés qu'ils pourraient être enregistrés comme des "agents de l'étranger" en vertu de cette nouvelle législation.

La loi stipule que toute "entité juridique enregistrée dans un pays étranger ou une structure étrangère sans entité juridique, distribuant (...) du contenu imprimé, audio, audiovisuel ou autre (...) peut être classée parmi les médias étrangers remplissant le rôle d'agents de l'étranger (...) si elle reçoit des ressources financières et (ou) autre de la part d'un État étranger, de ses institutions, d'organisations internationales ou étrangères, de citoyens étrangers et de personnes sans citoyenneté (...) ou de citoyens russes qui reçoivent des ressources financières et (ou) d'autres ressources provenant de sources susmentionnées". Si les organismes de presse sont reconnus comme des agents de l'étranger, ils risquent les mêmes conséquences que les organisations non commerciales en vertu de la loi agents étrangers et devront s'enregistrer en tant qu'agents de l'étranger et inscrire la mention "agents de l'étranger" sur toutes leurs publications. La loi permet aux autorités de suspendre les activités d'une organisation qui "remplit les fonctions d'un agent de l'étranger" mais qui ne s'enregistre pas en tant que tel. Les Codes administratif et pénal ont été modifiés afin d'introduire des sanctions pour les organisations et leurs leaders qui ne respectent pas la nouvelle législation.

La loi sur les "médias agents de l'étranger" autorise aussi le blocage extrajudiciaire de tout site web ou page personnelle contenant des "appels à des émeutes de masse, à des activités extrémistes ou à la participation en masse (du public) à des évènements organisés en violation de la procédure légale, ou les publications des organisations non gouvernementales internationales dont les activités sont jugées comme indésirables sur le territoire de Fédération de Russie". La loi sur les "organisations indésirables" a été adoptée en 2015 et interdit toute organisation étrangère qui saperait la sécurité, la défense ou l'ordre constitutionnel de la Russie. La loi prévoit aussi des sanctions administratives et pénales contre les organisations et citoyens russes engagés dans une "collaboration continue" avec les groupes jugés "indésirables".

Front Line Defenders condamne la loi sur les "médias agents de l'étranger" car il semble que cette loi enfreigne clairement la liberté d'expression et la liberté d'information, et qu'elle peut être utilisée comme un outil répressif afin de réduire au silence les voix dissidentes.