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13 Août 2019

L'inde doit garantir la sécurité des défenseur-ses des droits humains dans le Jammu -et-Cachemire

Front Line Defenders fait part de ses vives préoccupations concernant la sécurité et le bien-être des défenseur-ses des droits humains dans le Jammu-et-Cachemire, compte tenu de l'interruption des communications et des conditions similaires à un couvre-feu qui sont imposées dans la région. Ces restrictions font suite à la décision prise unilatéralement par le gouvernement indien de révoquer l'article 370 de la Constitution. L'article 370 de la Constitution indienne garantit au Cachemire une large autonomie par rapport au gouvernement central en lui permettant de disposer de sa propre constitution, de son drapeau et de son indépendance dans tous les domaines autres que ceux relatifs aux affaires étrangères, à la défense et aux communications. L'abrogation de l'article 370 change radicalement l'autonomie et le statut de la région. Les restrictions imposées depuis le 5 août dans le but d'empêcher une réaction générale contre la décision portent gravement atteinte à la sécurité des défenseur-ses des droits humains vivant dans la région et à leur capacité à mener à bien leurs activités pacifiques et légitimes.

Le 5 août, le gouvernement indien a annoncé sa décision d'abroger l'article 370 et de scinder l'État du Jammu-et-Cachemire en deux territoires de l'Union, administrés par le gouvernement fédéral. Depuis la décision il y a une semaine, des restrictions sévères sont imposées dans Jammu-et-Cachemire, avec un blocus sur la communication et la circulation de l'information. Les lignes téléphoniques, y compris les lignes fixes, les réseaux mobiles et les communications Internet, étant bloquées, les habitants du Jammu-et-Cachemire sont obligés de se fier à des téléphones limités et gérés par le gouvernement pour communiquer avec ceux qui se trouvent en dehors de la région. Bien qu'il n'y ait pas de couvre-feu officiel, les déplacements sont limités et des informations font état de fils barbelés et d'une forte présence militaire dans les rues. Durant les jours précédant cette annonce, il y a eu un important déploiement de soldats dans l'État, qui est déjà l'une des régions les plus militarisées au monde.

Les défenseur-ses des droits humains du Jammu-et-Cachemire ont toujours travaillé dans des conditions extrêmement vulnérables et hostiles. Les défenseur-ses qui documentent les violations des droits humains perpétrées par le gouvernement indien, en particulier par l'armée, sont victimes de représailles, notamment de menaces et de persécutions judiciaires. Les restrictions actuelles et la limitation continue des droits, notamment le droit à la liberté de parole et d'expression et le droit de réunion et d'association pacifiques, ont une incidence directe sur la sécurité des défenseur-ses des droits humains et sur leur capacité à accomplir efficacement leur tâche. Front Line Defenders est particulièrement préoccupée par l'information non confirmée d'arrestations et de détentions de masse, notamment de nombreux militants des droits humains, universitaires et avocats. Il est impossible de vérifier ces informations en raison des coupures de communication. L’impossibilité de contacter les défenseur-ses de la région, d’assurer leur bien-être et de veiller au respect du droit à bénéficier d'une procédure équitable en détention accentue les inquiétudes quant à leur sécurité.

Parallèlement à l'abrogation de l'article 370, le gouvernement indien a également modifié la loi sur la prévention des activités illégales (UAPA) et la loi sur les agences nationales d'enquête (NIA). L'UAPA, une partie de la loi régressive contre le terrorisme, est utilisée pour cibler et incarcérer les défenseur-ses des droits humains à travers l'Inde. Les amendements récents permettent aux individus (par opposition aux organisations seules) d’être proscrits sans processus clair et transparent. À la lumière d’incidents passés visant des défenseur-ses des droits humains au Cachemire basés sur des accusations infondées, il est à craindre que les nouveaux amendements, associés à un embargo sur l'information et à un manque d’accès à ces dernières, ne compromettent davantage la sécurité des défenseur-ses.

Front Line Defenders condamne toute mesure qui restreint ou sape le travail des défenseur-ses des droits humains dans le Jammu-et-Cachemire. Nous exhortons le gouvernement indien à remplir ses responsabilités et à garantir qu'ils soient autorisés à mener à bien un travail légitime et légal pour la défense des droits des autres.