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23 Septembre 2020

La reprise du projet Morelos Integral et l'absence de sécurité juridique met les défenseur-ses de l'environnement mexicains en danger

  • Les déclarations du gouvernement fédéral accentuent le risque de harcèlement à l'encontre du camp Apatlaco.
  • Au cours des derniers mois, les menaces, actes de harcèlement et la criminalisation des défenseur-ses du FPDTA-MPT se sont intensifiés.
  • Le travail de construction continue bien que seul 1 des 17 recours d'amparos1 ait été définitivement résolu.
  • Nous appelons à ce que la demande de dialogue du FPDTA-MPT sur le PIM soit respectée.

Lors de sa conférence de presse matinale le 10 septembre, le président Andrés Manuel López Obrador a annoncé la reprise du travail du projet Morelos Integral (PIM). Il a déclaré que les problèmes juridiques, sociaux et écologiques qui retardaient les travaux avaient été résolus et que le projet pourrait démarrer ses activités à la fin de cette année. Pendant cette conférence, la Ministre de l'Intérieur, Olga Sanchez Cordero, a annoncé que le projet n'était pas suspendu et que juridiquement, toutes les questions de protections avaient été résolues, c'est pourquoi Conagua avait donné les autorisation nécessaires au CFE. De son coté, Diana Alvarez, directrice de Banco del Bienestar, a affirmé qu'il y avait eu plusieurs approches ejidatarios2 après les consultations citoyennes de 2019.

Red-TDT, composé de 86 organisations de défense des droits humains dans 23 États de la République, Front Line Defenders et le Information Center on Business and Human Rights (CIEDH), qui accompagnent le Front populaire de défense de la terre et de l'eau - Morelos, Puebla, Tlaxcala (FPDTA-MPT), exprimons notre grave préoccupation face aux déclarations du gouvernement fédéral, car l'annonce de la reprise du projet rend ses membres vulnérables et aggravera le contexte local dans les trois États dans lesquels les agressions contre les défenseur-ses, y compris ceux qui gèrent le camp zapatiste à Apatlaco, sont courantes.

Il est important de rappeler que la participation à la consultation menée dans les communautés a été faible et que la consultation a eu lieu trois jours après le meurtre de Samir Flores, un défenseur du droit à la terre et à l'eau. À l'époque, le FPDTA-MPT avait dénoncé le fait que la consultation était discriminatoire, illégale et dénigrante, car le droit des populations autochtones à une consultation avait été violé, ce qui a été confirmé par la Commission nationale des droits humains (CNDH) lorsqu'elle a examiné des plaintes engagées contre le PIM, et inscrit dans la recommandation n°3/2018.

En ce qui concerne la situation juridique des différentes poursuites intentées contre le PIM, le FPDTA-MPT a indiqué que 17 recours d'amparos ont été intentés contre le projet et qu'un seul a été définitivement résolu, mais huit sont suspendus et une décision d'amparo sur la consultation préalable est en vigueur. Il souligne également que les recours d'amparos cités par la secrétaire Sánchez Cordero se réfèrent à 2 des 8 suspensions qui ont été résolues de manière très discutable. En résumé, l'actuelle situation des recours d'amparos est la suivante :

  • Les ejidos de Moyotepec, Tenextepago, Abelardo L. Rodríguez, Lorenzo Vázques et Valle de Vázquez sont suspendus, ce qui empêche l'utilisation de l'eau pour la centrale thermoélectrique.
  • La suspension de Huexca empêche le déversement des eaux de purge de la centrale thermoélectrique.
  • La suspension d'Amilcingo empêche le fonctionnement du gazoduc de Morelos.
  • Le jugement d'Atlixco protège les communautés par rapport au gazoduc de Morelos, qui nécessite une consultation libre, préalable, de bonne foi et adéquate, qui n'est pas encore terminée.
  • Le rejet de l'injonction de San Juan Ahuehueyo est particulièrement contestable, puisque l'expert de l'instance judiciaire venait de Conagua, l'autorité mise en cause.

Outre le statut juridique - qui contredit ce que l'exécutif fédéral a déclaré - nous constatons avec une grande inquiétude que, selon nos sources, il y a une augmentation des actes de harcèlement, des menaces et des persécutions contre les personnes qui défendent le territoire contre les divers travaux du PIM. Nous constations également que ces actions sont perpétrées en toute impunité et sans pouvoir accéder à la justice.

 

Nous lançons un appel urgent aux autorités pour qu'elles garantissent l'autodétermination et l'autonomie des peuples autochtones, en tenant compte du fait que le Mexique est le deuxième pays le plus dangereux d'Amérique latine pour défendre les droits des peuples autochtones contre les projets commerciaux, avec 49 attaques depuis 2015 selon l'ICHRP. Les déclarations publiques trompeuses et le manque d'accès à la justice augmentent la criminalisation, le harcèlement et les agressions contre les personnes qui défendent les communautés, et créent les conditions de la polarisation sociale et de l'effondrement du tissu communautaire.

 

Dans un scénario de risques accrus pour les défenseur-ses des droits humains et de conséquences graves sur le peuple autochtone Nahua et l'environnement, il est nécessaire de protéger et de garantir l'intégrité des défenseur-ses de l'environnement, et de ne pas ignorer, sous-estimer ou cacher des informations sur les processus juridiques d'amparos existants, et, plus important encore, d'écouter et servir les communautés affectées.

Nous appelons les différentes institutions gouvernementales mexicaines à :

1. Respecter la demande de dialogue autour du PIM, présentée par le biais d'une déclaration du FPDTA-MPT le 10 septembre.

2. Clarifier publiquement la situation juridique du projet Integral Morelos.

3. Garantir le droit à une consultation et au consentement des populations autochtones.

4. Garantir la sécurité et la vie de ceux qui participent au camp Apatlaco et qui forment le FPDTA-MPT.

5. Éviter toute expulsion violente du camp zapatiste d'Apatlaco.

6. Enquêter sur et résoudre le meurtre de Samir Flores et punir les coupables.

 

Red-TDT
Front Line Defenders
Information Center on Business and Human Rights (CIEDH)

 

1 Un recours d'amparo est un remède pour la protection des droits constitutionnels

2 les ejidatarios ne possèdent pas la terre mais sont autorisés à utiliser les parcelles qui leur sont allouées indéfiniment tant qu'ils ne laissent pas la terre inexploitée pendant plus de deux ans.