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6 Février 2024

#KeepItOn : Le gouvernement intérimaire et la commission électorale du Pakistan doivent garantir un accès à Internet ouvert et sécurisé tout au long des élections de 2024

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À l’attention de M. Anwaar-ul-Haq Kakar, Premier ministre intérimaire du Pakistan, et de M. Sikandar Sultan Raja, commissaire général aux élections du Pakistan.

CC : Major Général (R) Hafeezur Rehman, président de la Pakistan Telecommunication Authority (PTA) ; Dr. Umar Saif, ministre intérimaire des TIC et des Télécoms ; Capt. (Retd.) Muhammad Khurram Agha, secrétaire du Premier ministre ; Dr Syed Asif Hussain, secrétaire du secrétariat de l’ECP ; M. Shahid Farooq Alvi, président de la Telecommunication Access Provider Association (PTAPA)

 

Les institutions publiques ont le devoir de veiller à ce que les citoyens puissent accéder à un Internet ouvert, sécurisé et gratuit lorsqu’ils en ont le plus besoin, notamment lors d’événements nationaux importants. Lors des élections générales de 2024, nous exhortons les autorités pakistanaises à le laisser ouvert (#KeepItOn).

Nous, les organisations soussignées et membres de la coalition #KeepItOn — un réseau mondial de plus de 300 organisations de 105 pays qui travaillent pour mettre fin aux coupures d’Internet — vous appelons, Monsieur le Premier ministre Anwaar-ul-Haq Kakar et le commissaire électoral en chef Sikandar Sultan Raja, à vous engager publiquement à garantir au peuple pakistanais un accès sans entrave à Internet, aux plateformes de réseaux sociaux et à tous les autres canaux de communication durant toute la durée des prochaines élections générales du 8 février 2024. 

Alors que les Pakistanais se préparent à voter, les autorités pakistanaises doivent adopter et privilégier des mesures qui font progresser les droits humains, en permettant un accès illimité à l’information et à la liberté d’expression, de réunion et d’association — à la fois hors ligne et en ligne. Cela contribuera également à un processus électoral inclusif, libre et équitable. 

Internet et les plateformes de réseaux sociaux jouent un rôle essentiel dans le renforcement de la gouvernance participative, la promotion de l’inclusion et de la transparence, et la jouissance des droits humains fondamentaux dans une société démocratique. Ces plateformes permettent un discours public sur les processus électoraux et les candidats politiques, et permettent aux électeurs de demander aux gouvernements de rendre compte de leurs actions. L’accès à Internet et aux plateformes numériques facilite également le reportage, le suivi et la couverture des élections par les journalistes, les défenseur⸱ses des droits humains et les observateurs électoraux. 

Historique des coupures au Pakistan

Les dernières élections générales au Pakistan ont eu lieu en 2018, une année au cours de laquelle les Pakistanais ont subi au moins 11 coupures d’Internet, dont trois en l’espace d’une semaine seulement. 

Les autorités pakistanaises ont l’habitude d’imposer des coupures d’Internet, et elles ont déjà eu recours à de multiples coupures autour des activités de l’opposition durant ce cycle électoral. En mai 2023, les autorités ont coupé Internet, ciblant les plateformes de téléphonie mobile et de réseaux sociaux, en raison des manifestations qui ont suivi l’arrestation du chef de l’opposition et ancien premier ministre Imran Khan. 

L’accès aux réseaux sociaux a été bloqué en décembre 2023 et à deux reprises en janvier 2024, ce qui a perturbé la campagne électorale en ligne des partis d’opposition. Dans ce contexte, les justifications de la Pakistan Telecommunication Authority (PTA), qui attribue une coupure récente à des mises à niveau du système qui se poursuivront au cours des « deux à trois prochains mois », suscitent l’inquiétude.

Les coupures d’Internet portent atteinte aux droits humains, exacerbent les crises et empêchent la libre circulation de l’information

Les recherches montrent que les coupures d’Internet et la violence vont de pair. Couper Internet en période de conflit, de manifestation ou d’urgence sanitaire limite la disponibilité d’informations vitales, opportunes et susceptibles de sauver des vies, ainsi que l’accès aux services d’urgence. En perturbant la circulation de l’information, les coupures peuvent exacerber les tensions existantes, potentiellement susciter ou dissimuler la violence et les violations des droits humains perpétrées par des acteurs étatiques et non étatiques, entraver le travail des défenseur⸱ses des droits humains et favoriser la diffusion de fausses informations. 

Les coupures rendent également extrêmement difficile le travail des journalistes sur le terrain, privant ainsi les habitants du Pakistan et de l’étranger d’un accès à des informations crédibles. Une coupure d’Internet empêcherait également les principales parties prenantes, notamment la commission électorale du Pakistan, les observateurs électoraux nationaux et internationaux, les candidats des partis politiques et les acteurs de la société civile, de suivre de près le processus électoral. 

L’interruption de l’accès à Internet nuit également aux moyens de subsistance des personnes et a un effet négatif sur des économies entières. Les coupures peuvent coûter des milliards de dollars aux nations, et les entreprises, les organismes publics et les institutions privées qui dépendent de l’économie numérique perdent d’énormes sommes d’argent lorsqu’elles se produisent. 

Les coupures d’Internet sont contraires au droit national et international 

Le ralentissement ou la coupure de la connexion à Internet pour réprimer la liberté d’expression et de réunion viole les engagements pris au titre des articles 19, 16, 17 et 19A de la constitution pakistanaise en matière de liberté d’expression, de réunion et d’association, et d’information. Elle porte également atteinte à la responsabilité de l’État de garantir la liberté de commerce, d’entreprise et de profession, ainsi que le droit à l’éducation.

En outre, conformément à la récente directive de la Haute Cour du Sindh, la PTA et le gouvernement intérimaire doivent garantir un accès fluide et ininterrompu à l’Internet mobile et aux services haut-débit jusqu’au jour du scrutin et veiller à ce que les tentatives de truquage avant le scrutin soient signalées par le biais des réseaux sociaux.

À l’échelle mondiale, le Pakistan est lié par des cadres internationaux tels que la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), qui prévoient la protection et la promotion des droits à la liberté d’opinion et d’expression, à la liberté de réunion et à l’accès à l’information. 

Les coupures d’Internet sont fermement condamnées dans les réunions internationales, notamment par la résolution 47/16 du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, qui dénonce « l’utilisation des coupures d’Internet pour empêcher ou perturber intentionnellement et arbitrairement l’accès à l’information ou la diffusion de celle-ci ». Le secrétaire général des Nations unies et d’autres experts affirment également que « les coupures générales d’Internet et le blocage et le filtrage génériques des services sont considérés par les mécanismes des droits de l’homme des Nations unies comme une violation du droit international relatif aux droits humains ».

Les entreprises de télécommunications doivent respecter les droits humains

En vertu des principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme et des principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales, les entreprises de télécommunications ont la responsabilité de respecter les droits humains, de prévenir ou d’atténuer les préjudices potentiels et de remédier aux préjudices qu’elles causent ou auxquels elles contribuent. Les fournisseurs de services de télécommunications et d’Internet opérant au Pakistan ont la responsabilité de fournir un accès de qualité, ouvert et sécurisé à Internet et aux outils de communication numérique. 

Les coupures d’Internet — que ce soit au Pakistan ou ailleurs — mettent en péril les droits humains et ne doivent jamais devenir une norme. Nous encourageons les entreprises pakistanaises à intégrer les principes des Nations unies et les lignes directrices de l’OCDE lorsqu’elles répondent à des demandes de censure et d’interruption de réseau sur tous les marchés où elles opèrent. 

Recommandations

  • En tant qu’organisations défendant Internet et les plateformes numériques comme instruments de promotion des droits humains, nous vous appelons à :
  • Assurer publiquement au peuple pakistanais qu’Internet, y compris les réseaux sociaux et les autres plateformes de communication numérique, restera ouvert, accessible, inclusif et sécurisé avant, pendant et après l’élection ;
  • S’abstenir d’ordonner la perturbation des services de télécommunications, des plateformes de réseaux sociaux ou d’autres plateformes de communication numérique pendant toute la durée des élections ;
  • Veiller à ce que les fournisseurs de services de télécommunications et d’accès à Internet (FAI) mettent en œuvre toutes les mesures nécessaires pour fournir un accès à Internet de haute qualité, sécurisé, illimité et ininterrompu pendant toute la période électorale et après ; et
  • Veiller à ce que les opérateurs de télécommunications et les fournisseurs de services Internet informent la population pakistanaise de toute perturbation potentielle et prennent toutes les mesures raisonnables pour remédier à toute perturbation identifiée susceptible d’avoir une incidence sur la qualité de leurs services.

Faites-nous savoir comment la coalition #KeepItOn peut vous soutenir pour maintenir un Internet libre, ouvert, sécurisé, inclusif et accessible à tous au Pakistan. 

Nous vous prions d’agréer l’expression de notre haute considération

  • Access Now
  • Africa Open Data and Internet Research Foundation
  • African Freedom of Expression Exchange (AFEX)
  • AfroLeadership
  • Amnesty International
  • ARTICLE 19
  • Balkan Investigative Reporting Network (BIRN Hub)
  • Balkan Investigative Reporting Network Albania (BIRN Albania)
  • Bloggers Association of Kenya (BAKE)
  • Center for Democracy & Technology
  • Committee to Protect Journalists
  • Digital Rights Kashmir
  • Digital Rights Nepal (DRN)
  • Equidem
  • Forumvert Senegal
  • Freedom House
  • Frontline Defenders
  • Global Digital Inclusion Partnership (GDIP)
  • Global Network Initiative
  • Hashtag Generation
  • Human Rights Journalists Network Nigeria
  • Human Rights Watch
  • INSM for digital rights in Iraq
  • JCA-NET(Japan)
  • Kijiji Yeetu
  • LastMile4D
  • Life campaign to abolish the death sentence in Kurdistan
  • Media Foundation for West Africa
  • Miaan Group
  • Nubian Rights Forum
  • Office of Civil Freedoms
  • Open Observatory of Network Interference (OONI)
  • Organization of the Justice Campaign
  • Paradigm Initiative (PIN)
  • PEN America
  • Reporters Without Borders (RSF)
  • Rudi International
  • Single Mothers Association of Kenya (SMAK)
  • SMEX
  • Southeast Asia Freedom of Expression Network (SAFEnet)
  • Tech Global Institute
  • The Tor Project
  • Ubunteam
  • Unwanted Witness
  • Voices for Interactive Choice and Empowerment (VOICE)
  • Women of Uganda Network (WOUGNET)
  • Youths and Environmental Advocacy Centre (YEAC-Nigeria)
  • Zaina Foundation