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10 Juillet 2018

Lettre ouverte à Federica Mogherini d'Eurodéputés à propos de la situation en Algérie

Plus de 20 membres du Parlement européen ont signé une lettre ouverte adressée à Federica Mogherini à propos de la situation des droits humains en Algérie.

Federica Mogherini
Haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et
Vice-Présidente de la Commission européenne

Bruxelles, 9 Juillet 2018

Mme la Haute représentante/vice-présidente Federica Mogherini,

Nous, membres du Parlement européen, vous écrivons concernant le rôle de l'Union européenne dans la promotion des droits humains et de la démocratie en Algérie et la protection et le soutien aux défenseur-ses des droits humains dans le pays.

Maintenir les normes en matière de droits humains et la promotion de la démocratie doit être au cœur de l'approche de l'Union européenne avec ses pays voisins et partenaires, tel un élément crucial pour apporter la paix et la stabilité, pour s'attaquer aux causes de la migration et de la radicalisation.

Nous vous appelons, ainsi que les États membres de l'UE, à adopter une ligne solide pour soutenir les droits humains en Algérie, pour garantir que les défenseur-ses des droits humains en Algérie puisse pleinement exercer, en toute circonstances, leur droit à la liberté d'expression, d'association et de rassemblement pacifique, sans craindre d'être harcelés ou empêchés.

Nous rappelons que les Orientations de l’UE concernant les défenseur-ses des droits humains doivent être pleinement appliquées et que l'UE et ses États membres devraient prendre une position ferme et assurée en abordant la situation des DDH et en les soutenant. L'EU et ses États membres doivent donc insister sur l'observation de procès et rendre visite aux défenseur-ses et militant-es de la société civile emprisonnés à cause de leur travail, conformément aux Orientations de l’UE ainsi qu'à la résolution adoptée par le Parlement européen sur l'emprisonnement des travailleurs et militants des droits humains en Algérie. Cette résolution, adoptée en avril 2015, appelle le "SEAE et les États membres à surveiller étroitement tous les procès et les procédures judiciaires intentées contre les défenseur-ses des droits humains et les militants syndicaux par le biais de la présence de représentants de la délégation de l'UE et des ambassades des États membres à Alger et à faire un bilan de la question devant le Parlement [européen]". (1)

Trois ans après l'adoption de cette résolution et un an après l'adoption des priorités du partenariat UE-Algérie, nous regrettons que de graves manquements et violations des droits humains continuent de menacer les vies et la dignité humaine des défenseur-ses des droits humains en Algérie dont la situation nous inquiète vivement, tels que:

Abdullah Benaoum est défenseur des droits humains et milite sur les réseaux sociaux; il écrit sur des sujets tels que le droit du travail, les droits des prisonniers et les droits des personnes en situation de handicap en Algérie. Récemment, le 6 juin 2018, la cour d'appel de Ghilizan a confirmé la peine de deux ans de prison prononcée contre lui pour plusieurs accusations relatives à des messages postés sur Facebook dans lesquels il critiquait le gouvernement.

Amin Fiddah est un défenseur des droits humains arbitrairement détenu depuis le 13 janvier 2018. Il est accusé à cause de messages postés sur Facebook dans lesquels il critiquait les exécutions de masse perpétrées par l'armée algérienne. Il est accusé d'avoir "attaqué la morale de l'armée" et "d'incitation à s'unir contre l'unité nationale"; il est détenu le temps de l'enquête. Malgré les amendements de la constitution adoptés en 2016, les autorités algériennes ont toujours recours à des poursuites criminelles dans des affaires de liberté d'expression, en se basant sur le code pénal qui criminalise "les messages offensants à l'encontre du président" ou "les insultes contre les fonctionnaires".

Al-Taher Belabbas est coordinateur national du Comité national pour la défense des droits des chômeurs en Algérie. Il plaide pour le droit au logement, pour les mouvements syndicaux et le droit de former des syndicats ouvriers ou étudiants. Le 5 mars 2018, il n'a pas été autorisé à se rendre au Forum social mondial en 2018 au Brésil depuis l'aéroport international d'Alger. Le 15 avril, le tribunal de Warqala, dans l'est de l'Algérie, a condamné Taher Belabbas à deux mois de prison.

Un autre éminent défenseur des droits humains harcelé est l'avocat Ahmine Noureddine, qui représente des personnes dans la province de Ghardaïa, dont des membres de la minorité religieuse Amazigh Ibadi. Il est accusé de "fausse déclaration" et "outrage à un corps constitué" après avoir porté plainte contre la police pour torture. Il a été acquitté le 28 mai.

Nous souhaiterions avoir votre avis au sujet des récentes actions prises pour soutenir ces défenseurs des droits humains, et d'autres, ainsi que sur les prochaines mesures que vous prendrez avec les États membres de l'UE et auprès des autorités algériennes à cet effet.

Sincères salutations,

Ana Gomes (S&D)
Elmar Brok (EPP)
Petras Auštrevičius (ALDE)
Mark Demesmaeker (ECR)
Barbara Lochbihler (Greens/EFA)
Helmut Scholz (GUE/NGL)
Liliana Rodrigues (S&D)
Bart Staes (Greens/EFA)
Julie Ward (S&D)
Jordi Solé (Greens/EFA)
Pascal Durand (Greens/EFA)
Nessa Childers (S&D)
António Marinho e Pinto (ALDE)
Bodil Valero (Greens/EFA)
Theresa Griffin (S&D)
Tunne Kelam (EPP)
Magrete Auken (Greens/EFA)
Martina Anderson (GUE/NGL)
Dietmar Köster (S&D)
Jude Kirton-Darling (S&D)
Soraya Post (S&D)
Hilde Vautmans (ALDE)
Ana Miranda (Greens/EFA)

(1) Parlement européen, Motion conjointe pour une résolution sur l'emprisonnement des travailleurs et militants des droits humains en Algérie (2015/2665(RSP))