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29 Mars 2018

Lettre conjointe de la société civile au Premier ministre éthiopien désigné concernant l'arrestation de journalistes et défenseur-ses des droits humains

Front Line Defenders a signé une lettre écrite par la société civile éthiopienne adressée au Premier ministre désigné, concernant l'arrestation de journalistes, politiciens et défenseur-ses des droits humains éthiopiens lors d'une vague de répression menée par le gouvernement

M. le Premier ministre désigné, Dr Abiy Ahmed Ali

Cc: Abadula Gemeda, Porte-parole de la Chambre des représentants

Leurs Excellences,

Nous, les organisations internationales, régionales et nationales de défense des droits humains et de développement soussignées, vous écrivons pour vous faire part de nos profondes préoccupations concernant la récente arrestation de 11 journalistes, blogueurs et leaders de l'opposition politique en Éthiopie, dans le cadre de la nouvelle vague de répression lancée contre les libertés fondamentales. De telles mesures compromettent les obligations internationales du gouvernement éthiopien ainsi que ses récents engagements politiques pour initier une ère de grandes réformes démocratiques. En votre rôle de Premier Ministre, nous exhortons le gouvernement éthiopien à libérer immédiatement et sans condition tous-tes les défenseur-ses des droits humains, les militants politiques et les journalistes, y compris les 11 personnes arrêtées cette semaine.

Le 25 mars 2018, la police et les forces de sécurité éthiopiennes ont arrêté les journalistes Eskinder Nega et Temesgen Desalegn, les blogueurs de Zone9 Mahlet Fantahun, Befekadu Hailu, le blogueur Zelalem Workaggnhu et les militants politiques Andualem Arage, Addisu Getinet, Yidnekachewu Addis, Sintayehu Chekol, Tefera Tesfaye et Woynshet Molla.

Les défenseur-ses ont été arrêtés alors qu'ils assistaient à une réunion privée à Addis Abeba, au domicile du journaliste Temesgen Desalegn. Ce rassemblement privé était organisé en reconnaissance de la libération récente de milliers de prisonniers politiques malgré les importantes manifestations qui se déroulent actuellement contre la marginalisation politique et les accaparements de terres dans les région d'Oromia et d'Amhara, qui ont commencé fin 2015. Les 11 personnes sont actuellement détenues au poste de police de Gotera-Pepsi à Addis Abeba.

Dans les jours précédant le 8 mars, les autorités ont arrêté Seyoum Teshome, un éminent blogueur et professeur d'université. Seyoum Teshome, qui contribue régulièrement à Ethiothinkthank.com et qui avait été détenu pendant trois mois en vertu du précédent état d'urgence, est actuellement incarcéré dans la prison tristement célèbre de Maekelawi à Addis Abeba.

Bien que les autorités n'aient pas publiquement indiqué si des accusations seraient retenues contre le défenseur, en vertu de l'état d'urgence national rétabli en février, les groupes et les personnes doivent obtenir l'autorisation du poste de commande avant d'organiser des rassemblements publics.

Avant leur libération en février, plusieurs défenseur-ses avaient été emprisonnés pendant de longues périodes, allant de deux à sept ans, à cause de leur travail légitime en tant que journalistes, blogueurs et militants politiques. Eskinder Nega et les blogueurs de Zone9 ont reçu des prix internationaux qui célèbrent leur contribution au journalisme indépendant et aux droits humains.

Les arrestations font suite à l'instauration de l'état d'urgence le 16 février par le cabinet du Premier ministre, pour une période de six mois. L'état d'urgence comprend des dispositions draconiennes et très vagues. Parmi les plus inquiétantes violations des libertés démocratiques fondamentales, l'état d'urgence prévoit notamment l'interdiction totale de toutes les manifestations, la diffusion de toutes publications considérées comme "incitant et semant la discorde", notamment celles qui critiquent l'état d'urgence, et il autorise les arrestations sans mandat.

De telles mesures sont contraires au droit international relatif aux droits humains et à la constitution éthiopienne, et sont contre-productives pour la paix et la sécurité. L'invocation de l'état d'urgence criminalise les dissidents et persécute les défenseur-ses des droits humains, les manifestants et les journalistes.

Nous exhortons le gouvernement éthiopien à: (i) libérer immédiatement tous-tes les défenseur-ses des droits humains, les opposants politiques et les journalistes détenus pour avoir exercé leurs droits légitimes à la liberté d’expression, d'association et de rassemblement ; (ii) mettre fin à toute forme de harcèlement contre les journalistes et tous les citoyens qui ont des opinions critiques sur les questions nationales ; (iii) revoir et amender l'état d'urgence pour assurer que toutes restrictions des droits fondamentaux soient conformes aux obligations internationales relatives aux droits humains.

Sincères salutations,

Access Now
African Law Foundation (Nigeria)
ARTICLE 19
Asia Democracy Network (ADN)
Asian Forum for Human Rights and Development (FORUM-ASIA)
Asian Legal Resource Center (ALRC)
Association for Human Rights in Ethiopia (AHRE)
Association for Progressive Communications (APC)
The Article 20 Network
Balkan Civil Society Development Network (BCSDN)
Bytes4All Pakistan
Caucasus Civil Initiatives Center
Center for International Environmental Law (CIEL)
CIVICUS: World Alliance for Citizen Participation
Commonwealth Human Right Initiative (CHRI)
DefendDefenders (East and Horn of Africa Human Rights Defenders Project)
End Impunity
Endorois Welfare Council (Kenya)
Ethiopia Human Rights Project (EHRP)
Freedom House
Front Line Defenders
Karapatan (Philippines)
Global Participe (République du Congo)
Greenpeace Africa
International Civil Society Centre
International Service for Human Rights
JOINT - Ligas de ONGs em Mocambique (Mozambique)
Odhikar (Bangladesh)
OutRight Action International
Pakistan Fisherfolk Forum
PEN International
Reporters Without Borders (RSF)
Robert F. Kennedy Human Rights
Sengwer Indigenous Peoples Programme
Uganda National NGO Forum (UNNGOF)
West Africa Civil Society Institute (WACSI)
West African Human Rights Defenders' Network (WAHRDN)
World Movement for Democracy
World Organization Against Torture
Zimbabwe Environmental Law Association (ZELA)

Pour plus d'informations, contactez:

Erin Kilbride
erin@frontlinedefenders.org