Back to top
14 Janvier 2022

Inquiétude face aux nouvelles attaques armées contre les communautés autochtones et face à la prévalence de l’impunité dans l’État du Chiapas

Indigenous Peoples Rights International (IPRI) et Front Line Defenders expriment leur profonde préoccupation face à une nouvelle vague d’attaques contre les communautés autochtones tzotzil et tzeltals dans l’État du Chiapas, dans le sud du Mexique. Au cours des premiers jours de 2022, des organisations locales ont signalé des attaques armées, des disparitions et des violences contre la population civile et les défenseur-ses des droits humains dans les municipalités d’Aldama, Ocosingo, Chalchihuitán, Chenalhó, Chilón, Pantelhó et d’autres dans l’État du Chiapas.

Les communautés affectées ont signalé que l’impunité actuelle liée à ces attaques entraîne un climat d’insécurité qui conduit à des déplacements forcés. Les communautés autochtones ont également signalé que les groupes armés issus des forces paramilitaires maintiennent une forte présence et cherchent à contrôler le territoire de la région. IPRI a documenté les témoignages directs des membres de la communauté, selon lesquels ces groupes seraient constitués par les fils de ces paramilitaires qui ont été formés par l’armée mexicaine dans les années 1990. Ils mentionnent également qu’ils reproduisent des pratiques d’intimidation visant à entraver l’exercice des droits collectifs des peuples autochtones et des organisations communautaires.

Front Line Defenders et Indigenous Peoples Rights International font part de leurs préoccupations concernant le meurtre du défenseur des droits humains autochtone Simón Pedro Pérez López le 5 juillet 2021, dans la municipalité de Simojovel, qui reste impuni en raison de l’absence de progrès dans l’enquête. Cette impunité favorise la perpétration de nouveaux actes de violence, qui continuent d’affecter le tissu social et la sécurité des communautés organisées. Simón Pedro Pérez López était membre de l’organisation de la société civile Las Abejas de Acteal.

Depuis le 5 janvier 2022, les organisations soussignées reçoivent des informations sur les attaques constantes perpétrées par des groupes armés contre la population civile des communautés indigènes de Chivit, Stzelejpotobtik, Yeton, Xuxchen, Tabac, Juxton, Coco', Stselej Potov et la capitale municipale d’Aldama dans l’état du Chiapas. Le même jour, les autorités du gouvernement du Chiapas ont été alertées par les habitants d’Aldama au sujet d’explosions sur leur territoire.

Le 9 janvier 2022, des fusillades ont eu lieu dans diverses parties d’Aldama. Dans le village de Xuxch, le Tsotsil Javier Hernández de la Torre a été victime d’un tir d’arme à feu alors que lui et sa famille se rendaient à sa plantation de café. Javier Hernández de la Torre est membre des bases de soutien de l’Armée Zapatiste de Libération Nationale (EZLN). Il est actuellement en convalescence à l’hôpital après avoir reçu une balle dans la tête.

Le 10 janvier 2022, un jeune autochtone, Lorenzo Gómez Ruiz, est mort d’une blessure par balle dans la communauté de Stzelejpotobtik alors qu’il recevait des soins médicaux à l’hôpital de San Cristóbal de las Casas. Le même jour, vers 1 h du matin, un groupe d’environ 15 personnes cagoulées et armées est entré dans la communauté autonome du 16 Febrero, située dans la municipalité d’Ocosingo. Le groupe armé a agressé physiquement un mineur et a forcé une femme de la communauté, Hilaria Hernández Gómez, à quitter sa maison avec son fils de 3 ans, Tomas López Hernández. Bien que Mme Hernández et ses trois enfants aient été retrouvés plus tard sains et saufs, des organisations locales signalent que le groupe armé est toujours positionné sur les terres de la communauté.

Les communautés autochtones de l’État du Chiapas qui ont été attaquées lors de ces événements défendent pacifiquement leurs droits collectifs au territoire, à l’autonomie et à l’autodétermination. Ces droits sont défendus collectivement par les pratiques qui construisent leur autodétermination. Les attaques armées contre ces communautés constituent une tentative de nuire au tissu communautaire et à l’engagement collectif de protéger leurs droits.

Les organisations soussignées s’opposent à ces niveaux élevés de violence contre les défenseur-ses des droits des autochtones dans l’État du Chiapas, en particulier dans les municipalités d’Aldama, Ocosingo, Chalchihuitán, Chenalhó, Chilón et Pantelhó, et elles réitèrent leurs préoccupations face au climat d’impunité et à l’absence de conditions sécuritaires adéquates pour ces formes communautaires de défense des droits humains dans l’État du Chiapas.

Nous appelons les autorités fédérales et étatiques à clarifier ces nouveaux actes de violence, à mener une enquête avec toute la vigilance due afin de traduire les responsables devant la justice de manière expéditive, et à veiller à ce que les communautés de défenseur-ses puissent vivre dans un environnement sûr pour défendre et exercer leurs droits humains collectifs et individuels.