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21 Juillet 2020

Des organisations de la société civile exhortent 13 pays à joindre l'appel de l'UE pour le respect des droits humains au Cambodge

21 juillet 2020

Votre Excellence,

Nous, les 32 organisations de la société civile soussignées, exhortons les gouvernements d'Australie, du Canada, de Finlande, de France, d'Allemagne, d'Inde, du Japon, de Nouvelle-Zélande, de Suède, des Pays-Bas, de la République de Corée, du Royaume-Uni et des États-Unis d'Amérique, à soutenir l'Union européenne (UE) dans son appel au respect des droits humains au Cambodge. Le 12 août 2020, l'UE suspendra partiellement les concessions tarifaires "Tout sauf les armes" (TSA) accordées Cambodge en réponse aux "violations graves et systématiques" par le gouvernement cambodgien de quatre conventions relatives aux droits humains et au droit du travail : le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (1966), la Convention de l'Organisation internationale du travail (OIT) relative à la liberté syndicale et à la protection du droit syndical n°87 (1948), la Convention de l'OIT relative à l'application des principes du droit d'organisation et de négociation collective, n°98 (1949) et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (1966). 

Le gouvernement cambodgien continue de sévir contre la société civile, les médias indépendants, l'opposition politique et les défenseurs des droits humains pour faire taire les voix critiques dans le pays. Au cours des trois dernières années, il a adopté une série de lois répressives qui restreignent indûment les droits humains. En novembre 2019, les autorités cambodgiennes ont arbitrairement arrêté près de 90 personnes au simple motif qu'ils ont exprimé pacifiquement leurs opinions ou leurs orientations politiques et à cause de leur affiliation politique. Bien que 74 membres de l'opposition, détenus en vertu de fausses accusations, aient été libérés en décembre 2019, les charges retenues contre eux demeurent, et ils risquent d'être de nouveau arrêtés. Le procès pénal du chef de l’opposition Kem Sokha, injustement accusé de trahison, est entaché d’irrégularités depuis son ouverture en janvier. Sokha reste interdit de faire de la politique et risque jusqu'à 30 ans de prison s'il est reconnu coupable. Le Premier ministre a annoncé que le procès pourrait se prolonger jusqu'en 2021. 

En avril, le gouvernement cambodgien a profité de la crise du Covid-19 pour adopter une loi d'état d'urgence inutile et draconienne qui donne aux autorités des pouvoirs étendus et illimités pour restreindre la liberté d'expression, de réunion pacifique et d'association - des droits déjà sévèrement restreints pendant ses 35 ans au pouvoir. Actuellement, 30 autres prisonniers politiques sont derrière les barreaux en raison de l’attaque continue du gouvernement cambodgien contre la liberté d’expression sous prétexte de lutter contre le Covid-19.

Lorsqu'il a ratifié le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Cambodge s'est engagé à protéger et à promouvoir les droits humains fondamentaux, à assurer une protection égale de la loi et à organiser de véritables élections périodiques. Le gouvernement cambodgien a ratifié toutes les conventions fondamentales de l'OIT qui protègent les droits des travailleurs et des syndicats. Le respect des droits humains et de l'état de droit est essentiel pour un environnement commercial stable et florissant à long terme. 

Le Cambodge a accepté que l’accès au système commercial préférentiel "Tout sauf les armes", proposé par l’UE, soit subordonné au respect des principes de 15 conventions fondamentales sur les droits humains et le droit du travail. La décision de la Commission européenne du 12 février 2020, de suspendre partiellement les préférences TSA du Cambodge faisait suite à un processus d'un an d'un "engagement renforcé'' entre l'UE et le Cambodge, au cours duquel le gouvernement cambodgien a eu toutes les chances de coopérer et de faire des progrès significatifs pour améliorer sa protection des droits humains et du droit du travail. La Commission européenne a conclu que le Cambodge n'avait pas pris les mesures nécessaires pour conserver l'intégralité des prestations TSA. 

Nous sommes d'accord. Par exemple, le 22 janvier 2020, 23 entreprises et organisations non gouvernementales, y compris de grandes marques internationales de vêtements s'approvisionnant au Cambodge, ont fait part de leurs préoccupations concernant la situation du droit du travail et ont exhorté le gouvernement à modifier ou abroger deux lois profondément problématiques, la loi sur les syndicats et la loi sur les associations et les ONG (LANGO), et à abandonner toutes les accusations criminelles qui pèsent contre les dirigeants syndicaux. Les amendements symboliques apportés par le gouvernement à la loi répressive sur les syndicats n’ont pas permis de résoudre ce problème. Plus généralement, le gouvernement a démontré sa réticence à prendre des mesures concrètes et significatives pour améliorer la situation des droits ; au contraire, le Cambodge a adopté de nouvelles lois répressives et arrêté plus de critiques pacifiques au cours du processus intensif de suivi et d'évaluation. 

Nous appelons donc l'Australie, le Canada, la Finlande, la France, l'Allemagne, l'Inde, le Japon, la Nouvelle-Zélande, la Suède, les Pays-Bas, la République de Corée, le Royaume-Uni et les États-Unis d'Amérique, agissant collectivement et bilatéralement, à faire écho à l'UE dans son appel au gouvernement cambodgien, afin qu'il prenne des mesures concrètes sans tarder, y compris, mais sans s'y limiter, les mesures suivantes pour remédier à la situation des droits humains dans le pays :

  • Libérer immédiatement et sans condition tous les prisonniers politiques, y compris les militants, les défenseurs des droits humains, les journalistes et les membres de l'opposition politique.
  • Cesser le harcèlement, les arrestations arbitraires et les agressions physiques contre les dirigeants syndicaux, les militants pour le droit à la terre, les défenseurs des droits humains, les membres de l'opposition et les journalistes. 
  • Abandonnez immédiatement les accusations de trahison infondées portées contre le chef de l'opposition Kem Sokha.
  • Mener des enquêtes indépendantes, impartiales, rapides et approfondies sur les attaques, y compris les meurtres, contre les critiques du gouvernement et demander des comptes aux responsables. Par exemple, le gouvernement cambodgien devrait créer une commission d'enquête indépendante pour mener une enquête efficace sur l'exécution extrajudiciaire du commentateur politique et défenseur des droits humains Dr. Kem Ley en juillet 2016.
  • Abroger la loi sur la gestion de la Nation en période d'état d'urgence. 
  • Inverser les trois séries d'amendements à la loi sur les partis politiques, qui autorisent la dissolution arbitraire des partis politiques et interdisent arbitrairement aux chefs de parti toute activité politique.
  • Modifier de manière significative la loi sur les syndicats, en consultation avec les travailleurs, les défenseurs des droits des travailleurs et d'autres parties prenantes, afin qu'elle soit pleinement conforme aux conventions de l'OIT n°87 (liberté syndicale) et n°98 (droit de s'organiser et de négocier collectivement), toutes deux ratifiées par le Cambodge. 
  • Abroger ou modifier sensiblement la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales (LANGO), qui viole les obligations du Cambodge en vertu du droit international relatif aux droits humains. 
  • Cesser l’ingérence et la surveillance arbitraires exercées par le gouvernement sur la presse en ligne et hors ligne et mettre fin à l’utilisation de lois répressives pour censurer et contrôler les médias indépendants.
  • Rétablir le travail du Conseil d'arbitrage en lui permettant d'entendre tous les conflits relatifs au travail, y compris le licenciement des dirigeants syndicaux, et en garantissant un accès sans restriction à tous les travailleurs, quel que soit leur statut syndical.
  • Assurer une résolution rapide, juste et transparente de tous les conflits fonciers en fournissant une compensation équitable aux victimes d'accaparement des terres et, introduire un système efficace et équitable de titres de propriété, tout en mettant fin au harcèlement des défenseurs du droit à la terre et des communautés affectées.
  • Coopérer avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'Homme et avec les procédures spéciales de l'ONU afin de leur permettre d'exercer leurs mandats sans ingérence.

Le gouvernement cambodgien devrait prendre des mesures significatives pour inverser la détérioration de la situation des droits humains au Cambodge dans le but de rétablir les préférences commerciales ou de lever les suspensions de l’aide bilatérale. 

Nous exhortons votre gouvernement à appeler le gouvernement cambodgien à respecter ses obligations en vertu du droit international relatif aux droits humains, et à soutenir l'UE dans ses efforts visant à faire respecter les droits humains, l'état de droit et la démocratie pour le peuple cambodgien.

Nous vous prions d'agréer l'expression de notre haute considération 

1.Arab Network for Food Sovereignty - Regional
2. Article 19
3. ASEAN Parliamentarians for Human Rights (APHR)
4. Asian Democracy Network (ADN)
5. Asian Forum for Human Rights and Development (FORUM-ASIA)
6. Asian Network for Free Elections (ANFREL)
7. Asia Indigenous Peoples Pact (AIPP)
8. Business and Human Rights Resource Centre (BHRRC)
9. Civil Rights Defenders
10. CIVICUS
11. Clean Clothes Campaign East Asia
12. EarthRights International
13. Fair Labor Association (FLA)
14. FIAN Germany
15. Forest Peoples’ Programme
16. Front Line Defenders
17. Global Witness
18. Human Rights Now (HRN)
19. Human Rights Watch (HRW)
20. International Commission of Jurists (ICJ)
21. International Federation for Human Rights (FIDH)
22. International Freedom of Expression Exchange (IFEX)
23. International Service for Human Rights (ISHR)
24. Pakistan Kissan Mazdoor Tehreek
25. People’s Coalition on Food Sovereignty (PCFS) - Europe
26. People’s Coalition on Food Sovereignty (PCFS) - Global
27. Pesticide Action Network Asia Pacific - Regional
28. Roots for Equity, Pakistan
29. Struggle to Economize Future Environment (SEFE), Cameroon
30. The B Team
31. World Organisation Against Torture (OMCT)
32. Zambia Social Forum