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27 Novembre 2020

Appel à mettre fin à l’impunité dont jouissent les responsables du meurtre du défenseur des droits des peuples autochtones Sergio Rojas Ortíz et des graves attaques contre d’autres défenseurs des droits autochtones au Costa Rica

Forest Peoples Programme et Front Line Defenders réitèrent leur profonde préoccupation face à la décision du parquet d'abandonner les poursuites judiciaires dans l'affaire du meurtre du défenseur des droits des peuples autochtones Sergio Rojas Ortiz et estiment que cela reflète une situation d'impunité structurelle au Costa Rica. L'impunité continue d'être la réponse officielle de l’État face aux menaces répétées, au harcèlement, à la violence et aux homicides auxquels sont actuellement confrontés les leaders autochtones et les défenseur-ses des droits humains ; c'est une question particulièrement préoccupante et une violation des obligations internationales du Costa Rica en matière de droits humains.

Le 18 mars 2019, le leader autochtone Sergio Rojas a été assassiné chez lui sur le territoire indigène de Salitre, dans la province de Puntarenas. Il a été touché par 15 balles. Sergio Rojas était un leader Bribri renommé, qui, pendant plus de quatre décennies, a défendu les droits des peuples autochtones contre l'occupation illégale de leurs territoires. Depuis le 30 avril 2015, Sergio Rojas bénéficiait de mesures de précaution accordées par la Commission interaméricaine des droits humains (CIDH).

Le 24 septembre 2020, après une enquête brève et insuffisante sur le meurtre de Sergio Rojas, et sans avoir identifié les responsables, le parquet a annoncé sa décision d'archiver l'enquête, ce qui garantit l'impunité des coupables. Par la suite, le parquet, en contradiction avec son obligation internationale de protéger, promouvoir et appliquer tous les droits humains, a finalisé sa décision en demandant au tribunal compétent de classer l'affaire.

Le 3 décembre à 13h30, la demande de révocation du parquet, ainsi que les arguments du représentant légal de la famille Rojas Ortiz, seront entendus lors d'une audience devant le tribunal pénal compétent de Buenos Aires, qui entendra exceptionnellement l'affaire devant la cour de justice du tribunal de Pérez Zeledón. Nous rappelons donc que le pouvoir judiciaire a la responsabilité de s'assurer que toute décision est conforme aux obligations et droits contenus dans la CADH. Cette obligation est encore plus stricte lorsqu'il s'agit de préserver les droits des personnes spécialement protégées, pour lesquelles il existe des mesures de précaution supplémentaires. Ainsi, conformément aux termes de la CADH, il est de la responsabilité de l'État de respecter et de garantir les droits humains.

Par conséquent, les organisations de défense des droits humains signataires de cette déclaration exhortent l'État du Costa Rica à rouvrir le dossier de Sergio Rojas Ortiz et à s'acquitter de son devoir et de son obligation d'enquêter, de poursuivre et de punir tous les responsables de son meurtre, ceux qui ont pris la vie du défenseur des droits humains et se sont attaqués à l’intégrité de toute sa communauté. Cela nécessite donc de s’attaquer aux causes sous-jacentes de la violence qui ternissent le bilan du Costa Rica en matière de droits humains : l’occupation massive et illégale d’environ 24 territoires autochtones ayant des titres de propriété légaux, mais dont certains sont occupés illégalement à plus de 90%.

Pour conclure, nous réitérons notre profonde préoccupation, exprimée le 5 octobre 2020, concernant le fait qu'à ce jour, l'État du Costa Rica n'a pas traduit en justice les responsables : des violences continues contre les populations Bribri et Brörán (qui bénéficient toutes de mesures de précaution de la CIDH), ainsi que du meurtre du chef indigène Brörán Jehry Rivera et des attaques persistantes contre la vie des chefs et défenseurs indigènes Pablo Sibar et Minor Ortíz.

La lutte contre l'impunité se poursuivra, tout comme la mémoire de Sergio!